L’association représentative des principales plateformes santé (APFS) maintient plus que jamais la pression contre le projet d'évolution des actuels services numériques de tiers-payant sur le 100 % Santé.

Le projet d’encadrement législatif des dispositifs numériques de tiers-payant mis en place par les complémentaires sur le 100 % Santé continue de faire couler de l’encre, du côté des plateformes de santé. Pour la deuxième fois en quinze jours, leur association représentative, l’APFS*, vient de nouveau en contester le bien-fondé dans un communiqué. Cette fois-ci, le ton monte et se fait plus virulent. Non seulement l’APFS estime plus que jamais que cette mesure ne prend pas en compte la réalité de l’application du 100 % Santé et du tiers-payant aujourd’hui, mais en outre elle considère qu’il y a autour de ce projet « une désinformation orchestrée » et « une instrumentalisation politique ».

« Comme le gouvernement, nous ne pouvons que constater le peu de goût dont semble faire preuve une majorité d’opticiens sur le terrain pour accompagner la vente d’équipements 100 % Santé, qui représente moins de 3 % des ventes** (hors assurés CSS) depuis la mise en place de la réforme dans le domaine de l’optique. L’argument selon lequel la mise à plat du tiers-payant existant sur cette classe de lunettes serait la mesure la plus à même d’assurer sa plus large diffusion porte en soi une analyse erronée qui nous oblige à réagir pour rétablir des chiffres objectivés afin d’éclairer la décision publique et celle du législateur », fait d’abord valoir l’APFS. Qu'entend-elle par « analyse erronée » ? « En réalité 95 % au moins des contrats complémentaires santé proposent déjà un tiers-payant intégral sur le 100 % Santé, mais en laissant aux professionnels la possibilité d’y recourir ou pas. (…) Si certains achats d’optique de vue sont effectués sans tiers-payant sur le panier sans reste-à-charge du 100 % Santé, ce n’est en aucune manière du fait des Ocam ou de leurs opérateurs », argumente-t-elle. Et d’affirmer, dans cette logique, que la montée en charge du 100 % Santé souhaitée par le gouvernement ne saurait être mécaniquement liée au remplacement des services numériques de tiers-payant existants.

« Le succès du 100 % Santé n’est pas d’abord et avant tout corrélé à la possibilité d’y recourir via le tiers-payant, et la volonté acharnée de certains de n’intervenir que sur les modalités de ce dispositif de prise en charge pour participer à une plus large diffusion de la réforme témoigne de l’instrumentalisation politique qui s'opère de cette question technique », insiste l’APFS. Qui sont les « certains » que l'organisation met en cause ? Ceux des parlementaires, croit-on comprendre, qui sont partisans de l'évolution du tiers-payant sur le 100 % Santé mais aussi le Rassemblement des Opticiens de France qui a précédemment salué cette mesure introduite dans la première version du PLFSS 2022 il y a quelques semaines. « Les services numériques sont aujourd’hui hétérogènes selon les différents Ocam. En optique par exemple, même si le taux de recours au tiers-payant est plus élevé, une multitude de systèmes d’informations cohabitent, obligeant les opticiens-lunetiers à jongler entre différents services web ou logiciels selon la situation assurantielle du patient. Dans les faits, ces services numériques actuels ne garantissent pas non plus un fonctionnement efficace de la pratique du tiers-payant pour le patient », défendait de son côté le ROF dans une prise de parole sur le sujet début novembre…

Ce que redoute l’APFS, c’est qu’un changement des circuits d'enregistrement et de validation des prises en charge empêchent de facto « les complémentaires santé et les réseaux de soins d’avoir accès à des informations essentielles sur les équipements qu’ils remboursent ». Or, justifie l’association, ce sont ces éléments qui lui permettent d’assurer ses « missions légitimes » que sont les contrôles qualité et la lutte anti-fraude : « On voit ainsi la mise en place de la réforme du 100 % Santé être utilisée pour priver les Ocam et les réseaux de soins des informations véhiculées dans les flux de tiers-payant qu’ils opèrent en les remplaçant par un autre nouveau dispositif de tiers-payant ‘’100% Sécurité Sociale’’, qui a toutes les chances de se révéler ‘’100 % aveugle’’ pour les payeurs principaux que sont les complémentaires santé. » On verra très vite dans quel sens les parlementaires trancheront. Leurs délibérations sur ce point auront lieu dans le cadre des séances de la commission mixte paritaire, où députés et sénateurs finalisent le contenu du PLFSS 2022

* Pour mémoire, l’Association des Plateformes Santé (APFS) a vu le jour en mars 2021 et réunit les cinq principales plateformes de services santé gestionnaires de réseaux de soins en France : Carte Blanche Partenaires, Itelis, Kalixia, Santéclair et Sévéane.

** Les données avancées par la Direction de la Sécurité Sociale et la CNAM sont tout autres puisqu'elles avancent respectivement un taux de recours au 100 % Santé de 17 % et 14,6 %…

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