Même si la proposition de loi sur les réseaux a été votée, le collectif des "Opticiens-Lunetiers Unis" (ex-"Les Opticiens ne sont pas des pigeons"), reste mobilisé. Contre la loi mais aussi contre la vision que certains syndicats ont de la profession.

"C'est une parodie de démocratie !" Joint par téléphone il y a quelques heures, Yann Fournier, co-fondateur et animateur du mouvement "Les Opticiens ne sont pas des pigeons", qui s'est plus sobrement rebaptisé "Opticiens-Lunetiers Unis", est visiblement remonté. Après avoir suivi le vote de la proposition de loi sur les réseaux adopté en séance nocturne entre mercredi et jeudi, il ne décolère pas : "Rendez-vous compte : l'Hémicycle était quasiment désert ! Pour un débat aussi important, franchement, c'est risible", peste-t-il. De fait, seuls 61 députés étaient présents sur les bancs de l'Assemblée pour acter le texte de loi qui autorise les mutuelles à gérer des réseaux de soins. S'il tient à saluer Messieurs Dominique Tian, Julien Aubert et Marie-Christine Dalloz, trois députés UMP ayant, dit-il, "ferraillé contre la loi" au moyen des amendements, il rappelle surtout que son collectif, né sur Facebook et qui rassemble désormais 6 660 opticiens dans ses rangs, ne relâche pas la pression : "Au contraire. Nous continuons de réclamer un retrait pur et simple de cette loi. Pour nous il n'y a pas d'autre option. Des amendements ou des compromis n'y feront rien. Le législateur doit tirer un trait sur ce texte". Et d'expliquer : "Quand on y pense, la situation que l'on vit actuellement est une aberration. La France veut rendre légale une situation (les remboursements différenciés_ndlr) qui a été déclarée illégale au niveau européen. On marche sur la tête !". M. Fournier fait notamment allusion au fait que la MGEN a été déboutée dans une procédure menée auprès de la Cour de justice de l'Union Européenne (CJUE) pour casser sa condamnation par la Cour de Cassation datant de 2010. Dès lors, pour le chef de file des Opticiens-Lunetiers Unis, si jamais la loi, après son passage au Sénat, était promulguée, il saisirait dans la foulée le Conseil constitutionnel pour la faire invalider : "De toute façon, si ce n'est pas le législateur français qui le fait, les instances européennes s'en chargeront".

Pour le mouvement que cet opticien anime depuis l'Isère, où il exerce, pas question, donc, de baisser les bras. "Nous restons mobilisés pour nous faire entendre, particulièrement ces prochains jours". Dimanche 2 décembre, son collectif va ainsi participer à la Manifestation parisienne des Interprofessionnels de santé, qui partira à 14 h de la place Edmond Rostand pour finir devant le siège de la Mutualité Française. Dans le défilé, les opticiens y voisineront avec des kinés, des médecins, des chirurgiens et des dentistes, tous opposés à la proposition de loi. Le lendemain, lundi 3, à l'appel cette fois de son propre collectif, un rassemblement sera organisé devant le Conseil constitutionnel. M. Fournier assure que nombre d'opticiens feront le déplacement. Après quoi, les membres du collectif prendront la direction du quartier Montparnasse. C'est là qu'un colloque sera organisé par la Fnof pour passer en revue les moyens d'action dont dispose la profession pour obtenir gain de cause. Si M. Fournier tient à préserver la totale indépendance de son mouvement, il constate cependant un "plein accord avec la Fnof", seul syndicat a exigé, comme lui, le complet retrait de la loi. Il s'indigne en revanche de la position d'autres instances syndicales : "Certains syndicats affichent une position honteuse !", assène M. Fournier, qui cible particulièrement l'UDO : "Ce syndicat appelle ni plus ni moins à brader la profession. L'entente qu'il préconise avec les Ocam contribue à faire des opticiens des salariés des mutuelles. Or nous ne sommes pas de vulgaires marchands de lunettes à la solde des Ocam ; ce n'est pas, j'y insiste encore une fois, un business qu'il faut défendre mais notre métier". Définitivement, le porte-parole des Opticiens-Lunetiers Unis persiste et signe : "Nous n'avons pas vocation à devenir des succursales des mutualistes, ni moins encore leurs larbins".