Alors qu’il y a, légalement, une obligation vaccinale pour tous les professionnels de santé, un certain nombre d’opticiens ne souhaitent pas, pour l’heure, être vaccinés. Quid de leur situation à terme ? Nous avons échangé à ce sujet avec la Fédération nationale des opticiens de France (FNOF).

Si l’on nous remonte différents cas ici et là, il est évidemment difficile de savoir précisément combien d’opticiens sont, à l’heure actuelle, non-vaccinés. Dans une enquête que nous avions réalisée en mars dernier, moins de 20 % des sondés déclaraient ne pas vouloir se faire vacciner. Depuis lors, chacun le sait, le cadre légal a changé avec l’obligation vaccinale pour tous les professionnels de santé… Alain Gerbel, avec qui nous avons échangé hier à ce propos, estime que « les opticiens non-vaccinés sont ultra-minoritaires. » Selon lui, ils seraient au maximum entre 12 et 15 %, soit une proportion à peu près identique à ce que l’on observe à l’échelle nationale dans la population. Quand on interroge le président de la FNOF sur la situation de ces opticiens-là, il déclare qu’« un syndicat n’a pas à donner de consignes ou de mots d’ordre sur des mesures qui touchent à l’individu. Au mieux peut-on essayer de réfléchir collectivement et de façon constructive. » Ce qu’il souligne d’emblée : dans la relation, qui peut être compliquée voire tendue en ce moment, entre les personnels non-vaccinés et les employeurs, il faut tout mettre en oeuvre pour éviter d’en arriver à la suspension du contrat de travail. « Je tiens d’abord à rappeler, contrairement à ce que l’on peut lire ici ou là sur internet, que le contrat de travail ne prime pas sur la loi. Ce n’est jamais le cas en temps normal et encore moins dans un contexte de loi d’urgence ! Aucun salarié ne peut donc invoquer son contrat de travail pour faire valoir de quelconques droits en matière de non-vaccination ; c’est une interprétation loufoque du cadre légal ! Une fois qu’on a dit ça, soyons concrets : il y a toujours la possibilité, pour éviter une rupture entre le salarié et le patron, de recourir aux diverses mesures à disposition. » Et Alain Gerbel de citer une nouvelle affectation au sein de l’entreprise (déplacer un non-vacciné vers un poste qui ne serait pas en contact avec le public comme un atelier de montage décentralisé), un congé individuel de formation, le cumul des RTT ou encore, éventuellement, la mise en place d’une année sabbatique. Autant de dispositifs qui peuvent permettent aux opticiens non-vaccinés et à leurs patrons de gérer la situation - du moins temporairement.

Force est de constater, d’après les quelques témoignages que nous avons pu recueillir, que la non-vaccination donne parfois lieu à des crispations et des complications au sein de certaines entreprises. « Je ne me résous pas à me séparer de collaborateurs, qui par ailleurs me donnent toute satisfaction. Et ce d’autant moins à une période où le recrutement est déjà un vrai casse-tête », nous a confié un dirigeant qui compte deux non-vaccinés dans un effectif d'une dizaine de personnes. Si M. Gerbel avance des solutions concrètes pour, autant que faire se peut, normaliser « des situations parfois sous tension », lui-même reste toutefois, à titre personnel, un fervent partisan de la vaccination : « Elle est l’option la plus profitable à la collectivité en vue de l’immunité. Parmi les réticents à la vaccination, on se rend compte qu’il y a beaucoup de personnes mal informées. Ceux-là peuvent encore être convaincus du bien-fondé de la vaccination. Car le risque n’est pas le vaccin mais bel et bien le virus et ses variants, n’inversons pas les choses ! », fait valoir M. Gerbel. Et de souligner que ceux qui ne changeront pas d’avis, pour des raisons qui leur sont propres, devront dans les prochaines semaines ou prochains mois « assumer leur position » … Mais le représentant de la FNOF veut croire que « les réfractaires feront, finalement, le choix de la raison, qui est celui du vaccin. » « Si des situations de divergence entre salariés non-vaccinés et patrons devaient persister, commente encore M. Gerbel, l’employeur doit en tout cas bien avoir à l’esprit que c’est lui, s’il n’a pas tranché dans un sens ou un autre, qui pourra faire l’objet d’une sanction. » Tout en insistant particulièrement sur ce point de droit - la responsabilité du dirigeant -, le syndicaliste invite aussi à élargir le débat : « Peut-être que la non-vaccination de certains salariés est l’occasion, pour les entreprises, de favoriser la formation, de repenser tout ou partie de leur organisation. Avec, par exemple, la généralisation massive de la prise de rendez-vous, certains magasins peuvent sans doute revoir leur mode de fonctionnement. En cette période qui peut faire apparaître des divergences de conviction d’ordre personnel, il faut tout faire pour favoriser le dialogue au sein de l’entreprise. »

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