Trois questions à Alain Gerbel à propos de l’article 31 du PLFSS 2023 qui prévoit, entre autres, d’encadrer les marges des professionnels de santé délivrant des produits et prestations de la LPP. Le président de la Fédération nationale des opticiens de France (FNOF) dédramatise la situation, persuadé qu’en l’état cette disposition est inapplicable en optique.

Fréquence Optic : L’article 31 du PLFSS actuellement examiné par le Parlement fait beaucoup parler. Y a-t-il un vrai risque de le voir, tôt ou tard, s’appliquer en optique ?

Alain Gerbel : On joue à se faire peur ! Cet article 31 est un non évènement, une tempête dans un verre d’eau. En l’état, ce texte ne peut pas s’appliquer à notre profession, mais pour en arriver à cette analyse il faut avoir des connaissances juridiques et surtout avoir un sens politique. Apparemment, ce n’est pas donné à tout le monde, d’où l’agitation de notre microcosme professionnel. La perspective de voir l’État s’immiscer dans des problématiques sectorielles de prix, de produits et de prestations en inquiète beaucoup, évidemment, mais la réaction du secteur est épidermique et disproportionnée. En réalité, le risque est nul.

Pourquoi cet article, selon vous, ne serait-il pas du tout applicable ?

Pour qu’il entre en application en l’état actuel de sa rédaction, il faudrait d’abord une refonte complète des modes de remboursements et de la nomenclature. Ensuite, cela nécessiterait toute une série de décrets. Et enfin, cela obligerait à des négociations compliquées avec le Conseil économique des produits de santé (CEPS). Bref, ce serait une usine à gaz ! Peut-on sérieusement croire que le législateur veuille bouleverser le système actuel alors que l’État, via le régime obligatoire, ne rembourse quasiment rien en optique ? Réviser en cascade toutes sortes de règles de droits, à qui ça profiterait ? À personne. Non, ce n’est pas imaginable de voir entrer en vigueur, un jour, cette disposition. Le seul secteur qui pourrait être réellement impacté, c’est celui des prestataires de santé à domicile. Pour le nôtre, c’est mission impossible.
 
Malgré tout, l’établissement d’un statut d’exception pour l’optique vous semble-t-il de nature à tranquilliser la profession ?

Un statut dérogatoire ne changerait rien à la situation car les conditions d’application de cet article 31 sont, je le redis encore une fois, bien trop contraignantes pour l’État. Les appels à la mobilisation que j’entends ça et là me semblent donc inutiles. Il y a d’autres dossiers plus importants à traiter, avec des conséquences autrement plus tangibles, à commencer par les données personnelles de santé et la téléconsultation. Sur ce dernier point notamment, la situation règlementaire pourrait nous échapper si nous ne sommes pas plus investis et vigilants. Les nouvelles technologies doivent s’inscrire dans le cadre du redéploiement du métier d’opticien de santé et dans un exercice professionnel rigoureusement encadré pour éviter toutes dérives. Voilà un sujet qui, lui, est urgent.

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