Tel est l’avis d’une orthoptiste, Rajae El Hamdaoui, qui signe une tribune dans laquelle elle s’oppose à l’attribution d’un tel droit aux opticiens. L’évolution de la formation en orthoptie lui semble plus à même de répondre, demain, aux besoins de prise en charge des soins visuels.

Sur Caducee, le site d’information des professionnels de santé, Rajae El Hamdaoui, orthoptiste diplômée exerçant en Ile-de-France depuis plusieurs années, signe une tribune en son nom propre dans laquelle elle réagit aux récentes réflexions et propositions de la Cour des Comptes. Celles, en l’occurrence, qui suggèrent d’attribuer aux opticiens la détection des troubles de la réfraction pour raccourcir les délais d’attente des personnes en demande de soins visuels. « Mettre orthoptistes et opticiens sur un pied d’égalité en termes de prescriptions de verres correcteurs » est une fausse bonne solution, estime-t-elle : « Si l’intention de départ est bonne, elle génère à la fois un conflit d’intérêts notoire chez les opticiens mais également un risque de santé quant au traitement médical des patients. » Rajae El Hamdaoui justifie ainsi son point de vue : « Les opticiens n’ont en effet aucune compétence leur permettant de dépister les pathologies sous-jacentes non-visibles à partir d’un simple examen de vue ou lors d’un renouvellement de lunettes. Même si leur formation se voyait complétée », explique-t-elle en référence, sur ce dernier point, aux suggestions de la Cour des Comptes qui propose de conditionner l’octroi du droit de prescription à ceux des opticiens ayant au préalable suivi un complément de formation. « Cela soulève également un réel conflit d’intérêt. Même si le rapport suggère qu’’un patient ne pourrait acquérir un équipement d’optique dans le point de vente où il lui a été prescrit’,  de façon objective, et dans un intérêt médical certain, la prise en charge de la prescription de verres correcteurs ne peut être confiée à un acteur dont la vocation première est marchande », poursuit Rajae El Hamdaoui, ici en accord et en écho avec la prise de position du syndicat des ophtalmos à ce propos.

En tant qu’orthoptiste mais aussi en tant qu’ingénieure de la santé, son autre casquette, Rajae El Hamdaoui défend logiquement la place et le rôle de l’orthoptiste dans la filière visuelle : « La tendance récente d’attribuer à des formations différentes, des actes similaires, ne fait que complexifier le parcours patient. Le cas des orthoptistes face aux opticiens en est la preuve. Il est temps que chacun soit reconnu à sa juste valeur et sur son terrain d’application respectif. (…) Un recours pour les opticiens voulant élargir leur champ de compétence pourrait être une passerelle entre leurs formations actuelles et les études d’orthoptie via un accès direct à la première année d’orthoptie sans passer par le concours d’entrée ». Toujours en référence au contenu du rapport de la Cour des Comptes, Rajae El Hamdaoui fait observer que « la proposition d’un complément de formation avec un niveau master pour l’orthoptiste semble être une piste de réflexion pour solutionner ce problème. Il est dans l’intérêt du respect du domaine de compétence respectif des trois représentants de la filière visuelle qu’elle lui soit exclusivement réservée. » Schéma détaillé à l’appui de sa démonstration (ci-dessous), Rajae El Hamdaoui argumente : « Il serait intéressant que ce niveau de formation master soit complété par un assistanat de deux ans, dans une structure privée ou publique, en tant que professionnel salarié auprès d’un ophtalmologiste, qui, de par son rôle légitime, attribuerait un certificat diplômant à la prescription et au diagnostic de pathologies oculaires nécessitant de réadresser le patient. La formation actuelle passerait de trois à cinq années d’études complétées de deux d’exercice, soit sept ans au total. Cette configuration permettrait dans un premier temps de réduire le délai d’attente pour une prise en charge visuelle, mais aussi de permettre de conserver le schéma actuel de collaboration ophtalmologistes/orthoptistes selon un turn-over de deux ans. De surcroît, cela permettrait à l’orthoptiste de renforcer et de revaloriser sa formation et ses compétences afin de pallier à la demande grandissante dans les déserts médicaux. »

La proposition de réorganisation du cursus universitaire existant de l’orthoptiste spécialisé, selon Rajae El Hamdaoui :

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