Pour la Fnof, la proposition de loi déposée il y a quelques jours par le député socialiste Bruno Le Roux "s’inscrit dans un projet réfléchi de privatisation de la sécurité sociale".

Le dépôt, le 16 octobre dernier, d'une proposition de loi des socialistes visant à généraliser le principe des réseaux fermés en modifiant le Code de la Mutualité fait réagir, et même bondir, Alain Gerbel, le président de la Fédération nationale des opticiens de France. Dans un communiqué, le syndicat y voit une stratégie mûrement réfléchie : "A la veille du congrès de la mutualité, l’annonce de la modification de l’article L 112-1 du Code de la mutualité est pour le gouvernement un signe fort à destination de la FNMF (Fédération Nationale de la Mutualité Française), qui s’apprête à se substituer à l’Assurance Maladie pour rémunérer certains médecins spécialistes. Ainsi le plan est complet : modifier les fondements de la Sécurité sociale, de son financement basé sur l’universalité et la répartition, sans débat ni prospective. L’effort consenti par les mutuelles est d’abord celui de leurs adhérents qui vont cotiser davantage. Contrairement aux cotisations à l’Assurance Maladie qui sont proportionnelles aux revenus, les cotisations des complémentaires ont une assiette très variable, générant de grandes inégalités", expose Alain Gerbel qui poursuit plus en détail encore son raisonnement : "Les cotisations dans le cadre des contrats collectifs ne sont pas soumises à l’impôt par opposition aux cotisations des contrats individuels. Ce qui modifie le niveau de cotisations, ce sont les prestations prises en charge, plus importantes pour une cotisation plus chère. Au final, à moins d’une investigation poussée auprès des complémentaires concernées, rares sont ceux qui savent vraiment comment leurs dépenses de santé sont couvertes, ni non plus quels sont les frais de gestion de ladite complémentaire".

Sa démonstration se fait même plus précise encore : "La promesse de la FNMF s’élève à 150 millions d’euros sur les actes de quelques spécialités médicales. Ce n’est pas cher payé pour acquérir les clés du conventionnement des professionnels. Il n’est pas inutile de rappeler que ni l’UNOCAM, ni la FNMF, n’engagent leurs membres, pour preuve la charte de l’UNOCAM, pourtant en premier plan sur leur site internet, restée aujourd’hui lettre morte. Comment de plus faire confiance à des organismes qui ne respectent pas les décisions de justice et bafouent au quotidien les motions prises en assemblée générale ?" Pour le président du syndicat, il ne fait aucun doute que "très vite les opticiens vont se retrouver devant des conventions négociées sans leur accord, par des structures financières, dans le seul intérêt de prendre des parts de marché". Et d'ironiser non sans inquiétude : "Bienvenue dans le monde des carrossiers agréés".

Et les usagers dans tout ça ? Personne ne semble s'en soucier, estime M. Gerbel qui note "qu'ils sont réduits à devenir une clientèle captive des assureurs privés ou mutualistes et devront se faire soigner dans le réseau de leur assureur en échange d’un meilleur remboursement. Les malades deviennent ainsi eux-mêmes captifs et affecteront indirectement les tarifs des professionnels de santé, des opticiens. Ils devront baisser leurs tarifs pour être choisis et conserver leurs clients. Les 150 millions seront donc un investissement particulièrement rentable et avec une rapidité sans égale pour les assureurs".

Dans son communiqué, la Fnof en appelle à la mobilisation massive des élus. Le syndicat semble beaucoup attendre des parlementaires "auxquels nous avons en confiance donné mandat pour protéger l’accès aux soins, la transparence des comptes et l’égalité devant l’impôt". M. Gerbel exhorte ainsi les élus "à donner une chance à notre système de santé en refusant cette proposition de loi".